27Apr2009
La Croix - Lundi 27 avril 2009
Au
Chambon-sur-Lignon, la belle histoire des anciens du Cévenol
Alors que le célèbre collège auvergnat fondé par deux pasteurs vient de fêter ses 70 ans, l’association des anciens annonce un rassemblement exceptionnel lors du week-end de la Pentecôte
Cinquante-cinq ans se sont écoulés, mais l’émotion de Fernand Clerc, élève au Collège cévenol (Haute-Loire) d’août 1953 à juillet 1954, est restée intacte. La saveur du beurre de cacahuètes au petit matin, la douce atmosphère des lieux, la valse des saisons, les cours de rattrapage et les amitiés naissantes…
Comme la plupart des anciens élèves de l’illustre institution auvergnate, il n’a rien oublié d’une scolarité au parfum de liberté – l’établissement n’a jamais eu de clôture – et centrée sur l’autodiscipline et la responsabilisation.

Une belle histoire de retrouvailles

Lorsqu’il a lancé ce modeste site, en juin 2008, Laurent Pasteur n’imaginait pas une seule seconde provoquer un tel tourbillon de confidences. « Au départ, j’ai simplement mis en ligne mes propres souvenirs, dans l’espoir d’entrer en contact avec d’autres anciens », se souvient ce quinquagénaire, directeur adjoint d’une agence de communication. Et c’est après avoir vainement pisté la trace des vétérans du collège sur la toile qu’il se décide à renouer lui-même le fil de la mémoire « cévenolienne ».
« J’étais effaré de ne trouver aucun signe de toutes ces générations : aucun site Web, aucun réseau… Pourtant, ce collège jouit d’une réputation mythique dans le monde entier, grâce notamment à l’engagement des fondateurs en faveur de la non-violence, grâce aussi à une tradition d’accueil d’élèves étrangers », explique Laurent Pasteur, qui compare sa démarche à une « bouteille jetée à la mer ».

En quelques semaines, son blog fait le tour du monde

« À partir de là, tout dérape ! poursuit en souriant Laurent Pasteur. Me voilà obligé de me rendre sur place, quarante ans après. D’y rencontrer édiles et dirigeants locaux. De sonner le tocsin sur ce qui est train de se passer. Non sans difficultés ! » Car tout reste alors à inventer. Un noyau d’une quinzaine de bénévoles, ralliés via Internet, se mobilise pour coordonner l’événement. Des réunions s’improvisent à Paris, Genève, Strasbourg ou Lyon. L’association loi 1901 des anciens, déjà existante, est réactivée au même moment.
« Des gens qui ne se connaissaient pas se sont mis à travailler ensemble, une connivence incroyable s’est forgée en peu de temps », constate-t-il avec étonnement. Si 300 inscriptions ont été enregistrées à ce jour, près de mille « cévenoliens » du monde entier pourraient converger vers le village, d’après l’organisateur. Il y a dans « cette mise en empathie collective » quelque chose de « magique » et d’« exceptionnel », dit-il, après un silence.

Insuffler "une nouvelle dynamique"
Pour autant, « ce week-end n’est pas qu’un rendez-vous nostalgique »,
précise de son côté Fabien Larroque, à la tête de l’établissement depuis
septembre. S’il se réjouit de la mobilisation et de la ferveur des anciens – le
collège n’aurait pu, à lui seul, organiser l’événement –, il souhaite aussi que
ces derniers s’impliquent dans la vie du Cévenol, afin de contribuer à y
insuffler « une nouvelle dynamique ».
De fait, au cours des deux dernières décennies, l’établissement a connu de
sérieuses difficultés de gestion, à tous niveaux, dont il n’est pas encore
complètement sorti. Il a même frôlé la faillite en 1997. C’est dire les
attentes éveillées par ce rassemblement !
« Évidemment non, cet événement n’est pas la propriété des anciens ! »,
convient Laurent Pasteur, qui estime qu’il revient à l’actuelle équipe de
direction de s’emparer de ce mouvement pour aller de l’avant. Centré sur
l’éducation à la paix et la non-violence, le programme de ces journées de
Pentecôte veut raviver l’essence même de la vocation du Cévenol, en associant
jeunes pousses et aînés, sur fond de réflexion commune.
Aujourd’hui, si l’établissement revendique sa laïcité, l’esprit d’ouverture et
d’autonomie voulu par ses fondateurs protestants ne cesse d’irriguer la
pédagogie des lieux, dans le respect des programmes scolaires officiels. Les
220 élèves bénéficient ainsi d’une grande proximité avec leurs 36 professeurs,
qui assurent un suivi sur mesure. De même qu’une attention constante est portée
à la diversité des situations d’élèves issus de 19 nationalités.
Quant au « campus ouvert », ce pari éducatif est cher à Fabien Larroque : «
Dans la société d’aujourd’hui, la notion de respect de l’autre est une grande
nécessité : il s’agit de développer l’envie de travailler ensemble, de former
des jeunes responsables de leurs actes, pour eux-mêmes et au sein du groupe.
C’était déjà essentiel en 1938. Ça le reste, soixante-dix ans plus tard ! »
François-Xavier MAIGRE
Le Collège cévenol, un établissement mondialement réputé
Situé au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), le Collège cévenol a été fondé
en 1938 par les pasteurs André Trocmé et Édouard Theis, qui souhaitaient offrir
aux jeunes de la région la possibilité de poursuivre sur place des études
secondaires.
La Seconde Guerre mondiale les poussa à affirmer leurs idéaux de non-violence.
À cette époque, le pasteur Trocmé convainc la population du village
d’accueillir les enfants des réfugiés espagnols en 1938, ceux des Alsaciens en
1939, puis des enfants juifs menacés par les rafles.
La commune sera honorée par Israël du titre de « Juste parmi les Nations ». Le
Collège-lycée international cévenol, établissement privé sous contrat
d’association avec l’État depuis 1971, accueille aujourd’hui en externat ou en
internat des élèves français et étrangers.
Après des difficultés financières dans les années 1990, l’établissement
poursuit sa mission éducative, mettant l’accent sur les échanges internationaux
et le développement durable.
Voir l’article sur le site
Comments
Friday 1 May 2009 | 10:56
BRAVO & MERCI aux initiateurs de cet excellent article, paru dans la presse qu'il fallait (!), résumant parfaitement, me semble-t-il, l'esprit - et les efforts - de Laurent, l'enthousiasme de tous les participants à cette incroyable aventure, et l'espoir que le directeur actuel du Collège met dans ce sursaut d'énergie pour stabiliser son projet. Il apparait, clair comme l'eau du Lignon, que seul un outil de communication planétaire pouvait mobiliser les bénéficiaires de cette éducation dispersés sur le globe. C'est bien ce que Laurent a pigé immédiatement et c'est bien ce qui oriente vers la suite du soutien à apporter au Collège. L'Association des Anciens doit quitter le plateau, les besoins de ce collège et ses objectifs doivent être diffusés très largement. Il faut se décloisonner et s'ouvrir au Monde comme les fondateurs l'avaient compris en se faisant frères des réfugiés espagnols, alsaciens et juifs. L'article de La Croix nous montre le chemin. Merci à son rédacteur.
Sunday 10 May 2009 | 22:31
Je viens juste d'apprendre qu'il va y avoir un WE prévu pour les 70 ans du Cévenol et qu'il fallait s'inscrire !!! Je suis une ancienne élève comment être au courant de ce qu'il se passe au Collège?
Monday 11 May 2009 | 10:29
@coco : En faisant tous les jours ce que tu as fait hier : lire ce blog :-)
Tu peux encore t'inscrire, le programme et le formulaire d'inscription se trouvent sur cette page, dans la colonne de droite, il suffit de cliquer sur le lien et d'imprimer le fichier.
Au plaisir de te voir à la Pentecôte !